Quantcast
Viewing all articles
Browse latest Browse all 8681

Les oligarques du Net

Jeudi, 19 Juin, 2014 - 06:00

Cette Méfiance, ces craintes qui montent face à Amazon, Facebook et autre Google… Est-ce parce qu’on peine à comprendre leur fonctionnement? Ou, au contraire, parce qu’on commence enfin à saisir l’ampleur de leur pouvoir sur nos vies? S’agit-il d’un combat d’arrière-garde, d’une allergie au progrès mâtinée d’antiaméricanisme primaire? Ou d’une saine résistance à l’heure du soupçon d’une collaboration avec la NSA?

Depuis quelques mois, le président de Google, Eric Schmidt, se trouve en première ligne pour défendre son entreprise, mais aussi comme ambassadeur des autres géants de l’internet. Car ce qui se joue, de toute évidence, ce ne sont pas seulement des différends commerciaux et des embrouilles fiscales (lire son interview en page 44).

Depuis l’origine, les fondateurs de Google nourrissent en effet l’ambition d’un accès illimité à l’information et à la connaissance pour tous, depuis n’importe quel lieu, à n’importe quel moment. Une vision en passe d’être réalisée au-delà des rêves les plus fous. Et un succès économique phénoménal qui a rendu riches à millions des cohortes d’employés et d’actionnaires.

Google n’a pas seulement créé un moteur de recherche qui, dans les pays occidentaux, détient une position de quasi-monopole. Il contrôle, avec Android, une part de marché de 80% des systèmes d’exploitation des téléphones portables. Son navigateur Chrome est désormais leader. Fort d’un trésor de guerre de près de 60 milliards de dollars, il diversifie ses activités, investit dans la santé, dans des centrales solaires et éoliennes, dans l’automobile. Et s’apprête à expédier 180 satellites dans l’espace.

Pourquoi n’existe-t-il pas de Google européen? «Dans un contexte où tout est réglementé, où il faut une autorisation pour tout et n’importe quoi, l’innovation se révèle plus rare, répond Eric Schmidt à ses détracteurs. Il faut, pour innover, une culture de la pensée positive et de l’expérimentation. Une culture où il est permis de se planter… »  Il a mille fois raison, évidemment. Et tous ceux qui ont visité le campus de l’entreprise à Mountain View ou son centre zurichois, au bord de la Sihl, ressortent fascinés par la fièvre chercheuse et l’enthousiasme qui y règnent.

Seulement voilà, le succès de Google (et celui des autres pionniers de la Silicon Valley) n’a pas seulement une portée économique et technique, il questionne les valeurs de démocratie et de liberté, telles que comprises jusqu’ici.

Il y a bien sûr dans les résistances européennes l’aveu d’un échec entrepreneurial. L’amertume des losers numériques. Dans le même temps, le nouveau droit à l’oubli réclamé par l’Union, la défense de la sphère privée participent d’un enjeu de civilisation. Dans ce combat, c’est peut-être l’Europe, et plus particulièrement l’Allemagne, qui se révèle visionnaire. Et qui constitue une forme de contrepoids salutaire à l’hyperpuissance et à la précipitation des oligarques américains du Net.

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Image may be NSFW.
Clik here to view.
Rubrique Une: 
Auteur: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 
Contenu récent: 
En home: 
no

Viewing all articles
Browse latest Browse all 8681

Trending Articles