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Banquiers centraux: sauveurs du monde malgré eux

Jeudi, 15 Août, 2013 - 05:56

Cinquième volet de notre série avec «The Alchemists». En réinventant leur métier, Ben Bernanke, Jean-Claude Trichet et Mervyn King ont limité les dégâts de la crise.

Yves Genier

Ils sont trois et ils ont sauvé le monde. Trois banquiers centraux qui ont empêché la finance de précipiter l’économie dans la dépression. Ben Bernanke, Jean-Claude Trichet et Mervyn King sont les patrons respectivement de la Federal Reserve (Fed), la banque centrale américaine, de la Banque centrale européenne (BCE) et de la Banque d’Angleterre (BoE). Par leurs actions résolues, ils ont placé leurs institutions en première ligne du combat contre la crise financière qui s’est déclarée en août 2007.

En charge des banques centrales au Washington Post (racheté début août par le fondateur d’Amazon, Jeff Bezos), Neil Irwin fait le récit de ces myriades de séances d’urgence convoquées de jour comme de nuit, en semaine ou en week-end, ces innombrables téléphones, mails et conférences par lesquels les seigneurs de la politique monétaire ont cherché des réponses à une crise alors inédite. Le journaliste raconte comment ces brillants techniciens de la politique monétaire ont dû réinventer leur métier pour trouver des réponses à un désastre que plus personne, à commencer par les décideurs politiques, ne comprenait.

Surpris. En 2005, lors de la nomination de Ben Bernanke à la présidence de la Fed, personne ne s’attendait à la tempête qui allait survenir. La hausse massive des prix de l’immobilier aux Etats-Unis à cette époque était certes comprise comme un risque, tout comme celles du crédit et du secteur financier. Mais les dirigeants de la Fed «n’ont pas vu comment ces différents éléments se combinaient», note l’auteur. En ce temps-là, les banquiers centraux des grands pays développés préféraient s’auto­congratuler, persuadés d’avoir trouvé la formule magique permettant à leurs économies de croître sans inflation.

Aussi la crise les a-t-elle pris par surprise. C’est depuis sa maison de vacances à Saint-Malo, en France, que Jean-Claude Trichet a dirigé la première réunion de crise de la BCE, le 9 août 2007, pour contrer la tempête naissante. De même, ils sont restés largement impuissants face à la faillite de la banque d’affaires Lehman Brothers à la mi-septembre 2008. Certes, la Fed a juré du contraire. N’avait-elle pas convoqué les principales banques d’affaires de Wall Street pour trouver une solution de dernière extrémité, en ce fameux vendredi soir? En réalité, ses responsables «n’ont jamais eu de plan réaliste pour éviter la faillite», affirme l’auteur.

Ce manque d’anticipation, ajouté à la peur de perdre au passage leur indépendance, a conduit les banquiers centraux à des batailles mémorables sur les moyens de neutraliser la crise. La Fed s’est déchirée sur la question à l’automne 2010. Un de ses dirigeants a même lâché en privé qu’«il n’y avait aucun consensus» au sein du Comité monétaire, le saint des saints. A la BCE, la bataille, dès 2011, a été encore plus dure.

Les enquêtes sur le milieu aussi puissant que discret des banquiers centraux sont rares. La faute à un sujet aussi complexe que décourageant à la lecture. L’un des moindres mérites de Neil Irwin est d’en avoir fait une histoire passionnante.

«The Alchemists. Three Central Bankers and a World on Fire». The Penguin Press, 390 pages.

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dr
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