La carrière de Raoul Weil, 55 ans, a été brisée il y a six ans déjà. Depuis, l’ex-numéro trois d’UBS, qui rapportait directement à Marcel Ospel, a passé des années traqué par la justice américaine. Arrêté lors d’une escapade à Bologne puis extradé en Floride, il sera enfin jugé lors d’un procès qui s’ouvrira le 14 octobre. S’il est reconnu coupable, le Bâlois laissera son nom dans l’histoire comme le seul membre de la direction d’une banque à avoir été condamné pour la fraude fiscale organisée par sa banque, sous son autorité.
Acculé par les confessions successives de ses anciens collègues, Raoul Weil se battra sur le fond. Il tentera d’expliquer que l’accord fiscal en vigueur à l’époque entre la Suisse et les Etats-Unis n’interdisait pas explicitement de maintenir des comptes – peut-être non déclarés – pour des clients si ceux-ci ne détenaient pas d’actions américaines. «L’accord permettait de ne pas les déclarer», affirment les avocats de Raoul Weil. Les procureurs reconnaissent quant à eux que ce texte «ne l’interdisait pas». Le juge Cohn aura à trancher sur cette question philosophique: tout ce qui n’est pas explicitement interdit est-il permis? En abusant des arguties juridico-fiscales, les cadres d’UBS ont-ils violé non pas la loi, mais l’esprit de la loi? Faut-il reconnaître la liberté de violer la loi par des chemins que la loi elle-même n’interdit pas?
Outre le destin personnel de Raoul Weil et l’exemplarité de son cas, ce jugement sera important pour l’histoire du secret bancaire, tant les banques suisses ont joué sur cette limite. Pas seulement avec les Etats-Unis, mais avec tous les riches pays voisins de la Suisse.
